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Décision des Présidents
Gary Carr

Utilisation des sites Internet par les députés, 13 décembre 2000,  Président Gary Carr, Assemblée législative de l’Ontario

Contexte : Le lundi 5 décembre 2000, le député de Windsor-St Clair Dwight Duncan a soulevé la question de privilège pour émettre des réserves sur de l’information fournie à un site web du gouvernement. Il estimait qu’un communiqué affiché au site web du ministère des Services sociaux et communautaires constituait de la propagande partisane que ses commettants ou d’autres contribuables n’avaient pas à payer et qu’il avait été envoyé aux députés par le courrier législatif plutôt que d’être posté par le caucus. Le lendemain, le député a soulevé à nouveau la question de privilège pour faire savoir que le site web du Bureau du premier ministre ainsi que les communications Internet du ministre du Travail contenaient également de la documentation partisane. Il soutenait que ces documents violaient l’article 28 de la Loi sur la fonction publique, que le gouvernement essayait d’intimider l’opposition avec l’argent des contribuables et qu’il s’agissait d’une atteinte non seulement aux privilèges des députés et du chef de l’Opposition, mais à ceux du peuple de l’Ontario. Le leader du gouvernement à la Chambre est également intervenu dans cette affaire.

Décision (Président Gary Carr ): Premièrement, en ce qui concerne l’allégation d’intimidation à l’égard des députés, le fait que le site web du gouvernement contient des éléments d’information auxquels les députés s’opposent n’établit pas en soi à première vue une atteinte au privilège; certains éléments de la documentation peuvent fort bien être de nature partisane, mais il n’y a rien là à mon avis qui ait pour effet d’intimider les députés d’une manière qui constitue une atteinte au privilège.

Deuxièmement, comme les députés le savent fort bien d’après des décisions antérieures à ce sujet, c’est aux tribunaux et non au Président qu’il incombe d’interpréter les lois comme la Loi sur la fonction publique encore que le président du Conseil de gestion prendra sûrement les mesures qui s’imposent à l’égard des allégations.

Troisièmement, le droit des députés à l’information du gouvernement est limité à ce que prévoit le Règlement. Or, le Règlement ne confère pas aux députés le droit à l’information digne de confiance ou non d’un site web gouvernemental.

Quatrièmement, en ce qui concerne la distribution de documents partisans par le courrier législatif, je suis préoccupé davantage par le contenu des documents que par la méthode de livraison.

Enfin, les députés doivent savoir qu’il existe de nombreuses décisions à l’effet que le Président ne peut pas empêcher le gouvernement de transmettre un message politique censément partisan en se servant de fonds politiques.

Cependant, je ne veux pas donner l’impression que je suis indifférent à ce que j’ai lu dans la documentation que m’a communiquée le député de Windsor-St Clair. Je note que certains de mes prédécesseurs ont émis des réserves concernant les communications gouvernementales. Par exemple, le président Stockwell a déclaré le 22 janvier 1997, et je cite :

« Je tiens maintenant à émettre des réserves personnelles sur l’opportunité d’employer des fonds publics pour promouvoir par la publicité telle ou telle position sur une question dont la Chambre est saisie. Comprenez-moi bien », et c’est toujours le Président Stockwell que je cite, « je ne parle pas ici de publicités payées par des partis politiques, mais bien avec des fonds fournis par tous les Ontariens sans égard à leurs vues politiques. »

« Personnellement, je trouverais offensant que l’argent des contribuables serve à communiquer un message politique ou partisan. Il n’y a rien de mal à ce que les députés cherchent à influencer l’opinion publique dans le cadre de leurs débats; en fait, cela fait partie de notre tradition parlementaire. Mais j’estime que le gouvernement a tort d’essayer d’influencer l’opinion publique par des publicités payées par des fonds publics qui, je le rappelle, ne sont pas accessibles à l’opposition, plutôt que de le faire dans le cadre des débats parlementaires. »

Mes réserves personnelles au sujet de la documentation sont très simples et, même s’il s’agit d’une évidence, je tiens à l’exprimer. Les sites web financés par des fonds publics, par opposition aux sites web financés par des fonds politiques, devraient servir à communiquer avec le public d’une façon claire, raisonnable et concrète. Le gouvernement franchit une limite lorsqu’il se sert d’un site web ou de tout autre mécanisme financé par des fonds publics pour lancer une attaque provocante contre un député.

Par conséquent, même si j’estime qu’il n’y a pas à première vue matière à privilège dans cette affaire, il s’agit d’une utilisation indue des sites web gouvernementaux. J’espère donc que tous les députés comprendront clairement la différence entre une communication financée par des fonds publics et une communication financée par des fonds politiques et qu’ils se serviront des unes et des autres à bon escient lorsqu’ils communiquent avec les Ontariens.

Postscript – (le chef du gouvernement à la Chambre Norman Sterling) : J’ai entendu votre décision suivant laquelle il n’y a pas atteinte formelle au privilège. Je tiens à présenter des excuses au nom des ministres dont les sites web contenaient des communiqués apparemment politiquement motivés. Cela ne se reproduira plus. Nous sommes d’accord avec votre analyse concernant ce genre de documents. Ils devraient se trouver sur le site web de notre parti plutôt que sur les sites web de notre ministère provincial.


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Vol 24 no 1
2001






Dernière mise à jour : 2020-09-14